Retour sur trois jours de composition à La Timone !

Du 5 au 7 mars, l’équipe artistique de 99 Soignant.e.s s’est réunie à l’AP-HM pour transformer les 250 fragments écrits par les soignant.e.s lors des ateliers d’écriture en une pièce de théâtre. Avec Noëlle Mathis, Kristina Chaumont, Serge Cartellier et Yoann Boyer, nous avons exploré et sculpté cette matière dense faire émerger une parole collective. Ce texte polyphonique dévoile la tension entre l’idéal de l’hôpital et la réalité du quotidien, entre engagement et épuisement, entre coopération et solitude.La première lecture publique du 7 mars a déjà marqué les esprits par son intensité et son ancrage dans le réel. Place maintenant aux répétitions, avec près de 50 participant.e.s !

Marseille – mars 2025
Les 5, 6 et 7 mars, j’ai réuni l’équipe artistique à l’hôpital de la Timone, à Marseille (Assistance Publique – Hôpitaux de Marseille), pour composer la pièce 99 soignant.e.s à partir des textes écrits par les personnels hospitaliers de l’AP-HM entre le 15 janvier et le 27 février 2025.

Étaient présents Noëlle Mathis, de l’association Les Mots Voyageurs, qui a animé les ateliers d’écriture à mes côtés, ainsi que Kristina Chaumont et Serge Cartellier, futurs metteur.e.s en scène de la pièce. Yoann Boyer, chorégraphe, nous a rejoints le temps d’une journée, tout comme Sophie Bellon, Judith Chantre et Caroline Peragut, du service Communication, Culture et Mécénat de l’AP-HM.

Lors des ateliers d’écriture, Noëlle et moi avons proposé aux soignant.e.s d’explorer leur vécu professionnel autour de plusieurs thématiques illustrées par des textes littéraires : l’espace de l’hôpital, la relation de soin, l’organisation collective du travail, les émotions personnelles et le devenir de leur communauté professionnelle. De ce travail collectif d’écriture sont nés plus de 250 fragments, suivant le format original du projet 99.

Mais une pièce 99 n’est pas une simple collection de témoignages. C’est une forme polyphonique, qui fait entendre la diversité des expériences tout en laissant émerger un sens commun.

Pour faire apparaître cette structure latente, il faut d’abord suspendre les évidences thématiques et entrer dans une écoute profonde, affranchie de tout a priori. Le premier jour de la composition, nous commençons par laisser les textes résonner entre eux, portés par des voix singulières. Puis chacun.e exprime ses émotions, ses intuitions et sa compréhension de cette matière dense. Certain.e.s entendent la solitude des soignants, d’autres s’agacent de leur aveuglement, d’autres encore relèvent la verticalité du discours institutionnel. On remarque aussi la diversité sociale qui traverse l’hôpital, l’intensification du travail ; on note la lumière, les odeurs, l’importance des regards, le bloc opératoire comme un écrin préservé au cœur d’un environnement délabré… Peu à peu, nos échanges sculptent le texte, creusent les reliefs, jusqu’à faire surgir des lignes de force inattendues.

C’est souvent dans mon sommeil, la nuit suivant cette immersion, que les contours invisibles de la pièce se dessinent et la structure se révèle progressivement

Dans 99 soignant.e.s, la faille centrale se situe entre l’image idéalisée de l’hôpital et l’épreuve du réel. Institutionnel.le.s, formateur.trice.s, soignant.e.s, patient.e.s : nous avons tous rêvé d’un hôpital performant et accueillant, de soins innovants et humains, de soignants compétents et bienveillants. Mais cette vision se heurte au réel : un hôpital empêché par un sous-investissement public chronique, une société fragmentée où les attentes deviennent toujours plus individualisées, et, au cœur de ce système, des soignant.e.s tiraillé.e.s entre engagement et impossibilité de tout prendre en charge.

Cette dernière limite, intérieure, est la plus indicible pour les soignant.e.s car l’avouer questionne l’identité. Mais l’ignorer augmente le risque de dégrader sa anté, mentale et physique, et d’altérer la relation avec les patients et les collègues.

C’est autour de ces tensions que s’est construite la pièce, au plus près de ce qui traverse les soignant.e.s au quotidien, pour les regarder dans leur humanité, généreuse et fragile. On les verra évoluer entre empathie et infantilisation du patient, engagement et épuisement, coopération d’équipes et compétition statutaire, adaptation aux contraintes et frustrations.

La première lecture publique de la pièce le 7 mars à La Timone en présence Robin RENUCCI, Claire DESMAZIERES, Annalisa BARTOCCI  de La Criée et de Sophie BELLON-CRISTOFOL, Caroline PERAGUT, Estelle JEGOT, Joëlle SCHIAPPAPIETRA de l’AP-HM qui ont apprécié un texte très rythmé, prenant et très ancré dans la réalité hospitalière.

Les répétitions de théâtre commencent demain avec près de 50 participant.e.s.

GF

Merci aux contributeur.trice.s !  Cécile BACCOU – Joyce BARNIER – Caroline BEZAT – Evelyne BOULAND – Stéphanie BREGER – Jeanne CONIL – Bernadette DE SA – Naima DEBBAH – Annick DEMINO – Amy DOSSO MADOU-  Marie-Odile DURET – Raphaël ESPOSITO – Audrey ETIENNE – Fabrice FOURNILLIER – Clément GARCIA – Erika GNOJCZAK – Carole GUTMAN – Lina HAMEL – Wendy HOCHET – Marie Jeanne IKENE – Marion JAILLET – Anne-Sophie LEPIDE – Frédérique LOYER – Nora MILOUDI – Floriane MULLER – Isabelle PELLEGRINI – Anne Marie POMMIER – Isabelle RICHER – Fabienne ROSSER – Anissa SAADI – Pedro SANCHEZ – Sylvie VANEL – Marion WEGNER.

Voir la pièce

📅 99 Soignant.e.s : 23 et 24 mai 2025 à La Criée – Théâtre national de Marseille
🎟️ Réservations gratuites dès avril 2025

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